Ces trucs que je dis tout le temps

Une illustration conceptuelle

Une illustration conceptuelle

A force d’animer des ateliers d’impro, je m’aperçois que je passe beaucoup de temps à répéter les mêmes choses. Que ce soit des conseils très spécifiques (voire même des lubies personnelles…) ou des choses plus générales.

Je vais essayer de lister ici ces choses que je redis en boucle.

Ne vous concentrez pas sur un élément tiers !

Ah celui-là je dois le dire à presque chaque atelier… C’est tout bête mais en particulier chez les improvisateurs débutants on a très souvent des impros à deux où les deux personnages regardent quelque chose, ou interagissent avec un élément, au lieu d’interagir l’un avec l’autre.  Ça peut être de parler d’un troisième personnage qu’on ne rencontrera jamais, ou de parler d’un objet extraordinaire qu’on ne voit pas (puisqu’il est mimé…), ou même de parler d’un événement futur (ah le fameux « on ne sera jamais prêt pour le spectacle la semaine prochaine » !). Et cet élément tiers sur lequel tout le focus est mis a généralement comme effet principal d’éviter toute interaction entre les personnages sur scène.

Evidemment on peut tout à fait avoir des scènes à deux personnages qui mentionnent ou font intervenir d’autres éléments, mais en général c’est quand les personnages commencent à s’intéresser l’un à l’autre plutôt qu’à autre chose que la scène prend vie. Et c’est encore plus le cas dans le cadre d’exercices orientés sur les relations entre personnages (comme Sexy Smelly Stupid) ou les exercices limitant l’usage de la parole (gromelot, Franck-Elsa, muet…).

 

Vous avez tout votre temps !

Autre gros défaut qu’on voit souvent : la précipitation. Peut-être par peur qu’il ne se passe rien et que le public s’ennuie, tout va toujours très vite. C’est le cas dans l’avancée de l’histoire elle-même, ce qui fait que de nombreux éléments ne sont pas développés ou bien sont ignorés, mais c’est aussi le cas pour d’autre éléments ponctuels. Par exemple si un objet est mimé, que ce soit un verre qui est servi ou une porte qui est ouverte, c’est très souvent précipité et parfois  incompréhensible, alors que n’importe qui est capable de faire un mime détaillé, qui sera à la fois plus clair et plus sympa à regarder.

Autre cas : les narrations externes. Si quelqu’un entre en tant que narrateur pour dire « 2 heures plus tard, dans la cave », il y a de bonnes chances qu’il le fasse très rapidement, voire même depuis la réserve, avec le risque de ne pas être bien entendu et compris. Pourtant il peut tout à fait prendre 10 secondes pour venir clairement en avant scène, se poser, dire ce qu’il veut dire et ressortir. On n’est jamais à 10 secondes près, après tout.

 

N’hésitez pas à sortir !

Il peut même m’arriver de dire « Si vous êtes 4 (voire 3…) sur scène, trouvez une raison de sortir ». C’est encore un défaut assez récurrent chez les débutants : ne pas vouloir (ou oser) sortir de scène. Et autant des improvisateurs expérimentés peuvent bien gérer des scènes à plusieurs personnages, quand on débute c’est loin d’être simple. Généralement pour travailler le fait de sortir de scène j’utilise des formes théâtrale, par exemple « à la manière de Molière », ou l’exercice de la « Constellation », qui est tout bonnement excellent, ou encore « Sexy Smelly Stupid ».

 

 Rajoutez une relation amoureuse !

Bon je ne crois pas que je le dise explicitement comme ça, et c’est peut-être plus une obsession personnelle, mais je trouve que ça reste un bon conseil. J’insiste globalement beaucoup sur ce que les personnages ressentent les uns vis-à-vis des autres, et la relation amoureuse est pour moi une des plus simples à mettre en place et une des plus simples à développer. Une énième scène de prof de danse avec un élève ? Que l’un soit amoureux de l’autre et tout à coup ça devient intéressant. Du coup j’ai tendance à rajouter des histoires d’amour dans presque toutes les impros où je joue…

Ceci dit je me souviens d’un spectacle où après coup j’avais réalisé que j’avais joué un personnage amoureux dans presque toutes les scènes. Je l’ai mentionné à quelques spectateurs qui m’ont dit grosso modo : « Ah oui, c’est vrai, maintenant que tu le dis… ». Comme quoi même s’il y a de l’amour partout, sous une forme ou une autre, ça ne devient pas redondant.

 

Évitez les voitures…

Ah un de mes chevaux de bataille : les voitures en impro. Ça fait partie des choses que je déconseille vivement aux débutants. Pourquoi ? Parce que c’est affreusement complexe et contraignant ! Déjà dans une voiture on est assis (avec un peu de chance il y aura des chaises sur scène… souvent non), sans possibilité de bouger, ce qui limite déjà pas mal les possibilités. Ensuite dans une voiture on a : des portes, des vitres, des ceintures, des rétroviseurs, un volant, un levier de vitesse… Ça fait énormément de choses à mimer, et concrètement sauf avec des improvisateurs très portés sur le mime et suffisamment expérimentés on va se retrouver rapidement dans une voiture de 30 m² où tout le monde passe à travers les portes et où on ne sait jamais si on roule ou si on est à l’arrêt.

Et si la voiture n’est là que pour passer d’un lieu A à un lieu B, alors elle devient en plus franchement inutile, autant arriver directement après une petite ellipse.

Attention, je ne dis pas qu’il ne faut JAMAIS avoir une voiture sur scène, ou qu’il est impossible de faire une bonne scène en voiture. Bien sûr que non, c’est juste un objet complexe et encombrant, qui rend l’impro plus complexe, donc autant l’éviter.

 

Dites PAN ! et Toc Toc !

Là encore, c’est un peu une obsession de ma part  : les bruitages communs qui ne ressemblent pas du tout au bruit voulu. Et le pire dans cette catégorie est pour moi le coup de feu. Et je vois beaucoup (beaucoup) d’armes à feu dans les impros. Et la plupart du temps, lorsque quelqu’un tire il fait un bruit que je peux difficilement décrire ici mais qui ressemble en gros à un raclement de gorge pré-crachat, une sorte de « PRRRRR ». Et ça ne ressemble absolument pas à un coup de feu. Du coup on a des gens sur scène qui tirent des coups de feu, sans que les autres personnages réagissent, ou alors très tardivement. La caractéristique principale d’un coup de feu est à mon avis que c’est un bruit assourdissant.  Pour faire ça le meilleur moyen est encore de crier, et en l’occurrence crier « PAN » peut faire suffisamment de bruit et en plus tout le monde comprend qu’il s’agit d’un coup de feu. Mission accomplie.

On a aussi beaucoup de portes mimées en impro, et là encore je trouve qu’un bon vieux « toc toc » est ce qu’il y a de plus efficace. Même si les joueurs sur scène ne voient pas la personne frapper, s’ils entendent « toc toc » ils comprennent tout de suite. C’est beaucoup plus clair je trouve que la fameuse technique du « je tape du pied en frappant avec la main ».

 

 

Voilà tout ce qui me vient en tête pour le moment… Si j’en vois d’autres j’écrirai peut-être un volume 2.

 

Et sinon je passe aussi beaucoup de temps en atelier à claquer des doigts. Ne me demandez pas pourquoi.

 

 

 

4 réflexions sur “Ces trucs que je dis tout le temps

  1. Article très intéressant …Toutefois, de mon avis totalement subjectif de spectateur ..je trouve que les histoires d’amour ….ben ….j’aime pas. Autant je plussois le fait de penser à rajouter des sentiments mais ….pas forcement une histoire d’amour. A mon sens c’est difficile d’etre crédible dessus. Le potache est bien mais ca colle pas toujours :s

    J’aime

    • Ah une histoire d’amour potache forcément ça ne va pas être très intéressant, et surtout on peut être complètement crédible. Après je ne pas forcément d’une « histoire d’amour », mais que des personnages soient (ou pas) amoureux, dans une histoire quelle qu’elle soit. Donc par exemple dès qu’on a un couple dans une histoire ça devrait transparaître d’une façon ou d’une autre, et ça amène un tas d’autres possibilités, que ce soit de la tromperie, de la jalousie, de la peur, de l’espoir, du désespoir, de la colère… J’en parlais dans je ne sais plus quel autre article mais la grande majorité des films/pièces/livres intègrent au moins une histoire d’amour sous une forme ou une autre, et c’est souvent un point majeur de l’intrigue, donc pourquoi ce ne serait pas la même chose en impro ? Après tout on raconte aussi des histoires…

      J’aime

  2. Moi j’adore les voitures !

    Je ne trouve pas ça très important qu’il y ait beaucoup de choses à mimer.

    En revanche, c’est effectivement plus difficile parce que c’est plus difficile d’être physique, on ne peut pas se déplacer. Mais je trouve que c’est un lieu hautement dramatique (et ce n’est pas un hasard si c’est ultra exploité dans le cinéma).

    J’aime

    • C’est sûr que vachement intéressant comme lieu, ne serait-ce que le fait d’être restreint dans ses mouvements peut apporter beaucoup. Encore faut-il utiliser cette opportunité.
      J’ai été traumatisé par tellement d’impros détruites par des voitures que pour moi la voiture devrait rester l’apanage des improvisateurs expérimentés et/ou très porté sur la physicalité…

      J’aime

Répondre à Hugh Tebby Annuler la réponse.