3 raisons de jouer son propre genre

weirdo

C’est un sujet qui revient très souvent dans mes ateliers, et il n’y a pas vraiment de consensus sur le sujet parmi les improvisateurs que je connais. Des hommes peuvent-ils jouer des femmes et vice-versa ? Il y a ceux qui sont pour, d’autres sont contre, d’autres penchent d’un côté mais pas radicalement et certains sont foutent royalement. Je penche pour ma part assez fortement vers le « chacun son sexe », et voici 3 raisons.

J’ai parlais déjà un peu dans cet article sur le sexisme, mais j’en remets une couche pour être dans l’air du temps, bien que toujours un peu à la bourre.

1 – Pour éviter la confusion

C’est de loin l’argument le plus simple et évident : si tout le monde joue des personnages de son propre sexe alors personne ne se trompera. Il y a déjà tellement d’occasions de créer de la confusion, surtout avec des improvisateurs débutants, pourquoi en rajouter une autre ? Et même avec des improvisateurs très expérimentés, des comédiens professionnels, il m’est arrivé de me poser la question sur scène : est-ce qu’il joue une femme ou un homme très maniéré avec une voix fluette ? Naturellement je vais pencher vers la deuxième réponse, mais souvent ce ne sera pas ce que voulais jouer ce comédien.

En plus l’effort d’imagination de la part des comédiens et du public sera d’autant plus grand, ce qui n’aide pas à rester dans l’instant et jouer la situation.

Le même argument pourrait être mis avant pour utiliser les vrais prénoms des comédiens, au lieu de Robert, Gérard et Gisèle. Aller, soyons fous, faisons ça !

2 – Pour éviter les stéréotypes

J’ai souvent entendu que jouer des personnages d’un autre sexe permettait de jouer une plus grande variété de personnages. Sauf que si l’on considère qu’un personnage est défini par sa personnalité et son physique (sa façon de se mouvoir, de parler…), quelles caractéristiques seraient dépendantes du sexe ?

Dans la majorité des cas que je vois, en particulier dans mes ateliers, des gens se retrouvent affublés (parfois contre leur gré) du sexe opposé, parce que la situation dans laquelle ils sont ou le type de personnage qu’ils interprètent sont connotés « masculins » ou « féminins ». Par exemple dans un contexte militaire avec une fille jouant un gradé, quelqu’un va l’appeler « Monsieur le général ». Ou dans une situation parent-enfant, l’enfant va appeler l’autre « maman » alors même que le comédien est un homme (surtout si le parent en question est inquiet ou émotif, s’il est distant ou en colère ce sera sans doute « papa »).

Et dans tous ces cas utiliser le sexe des comédiens n’aurait aucune conséquence sur la scène, à part éviter la confusion. Et en bonus la scène ne participerait pas à la validation de stéréotypes sexistes.

3 – Pour jouer le décalage (ou pas)

Et si on est dans une situation où le fait qu’un personnage n’ait pas un sexe particulier paraisse vraiment décalé ? Par exemple pour une scène dans un institut de beauté (même si les salons pour hommes se développent de plus en plus), un garage automobile (même s’il y a des femmes garagistes) ou dans un contexte historique particulier (même s’il y avait aussi des « cowgirls » dans le far west ou des femmes chef d’entreprise au XIXe siècle).

Eh bien dans ce cas tant mieux, non ? On cherche tellement souvent un « décalage » dans une scène pour la rendre intéressante, et là le décalage serait tout trouvé.

Après charge aux comédiens de décider s’ils veulent insister sur ce décalage ou au contraire l’ignorer. Par exemple dans le cas courant de deux hommes jouant des parents, on aura souvent l’un qui jouera une femme. Mais en jouant deux papas (une situation vécue par des centaines de milliers de personnes à travers le monde) ils peuvent choisir de jouer ce décalage en en faisant le sujet de la scène ou au contraire choisir d’ignorer cette donnée et de jouer la scène sans en tenir compte. Et ce second choix peut souvent faire passer un message plus fort et plus subtil.

Oui mais bon…

Alors oui, on peut aussi trouver des cas où le sexe d’un personnage est quasi-imposé. Si vous voulez jouer une scène de quelqu’un ayant ses règles pour la première fois, le personnage principal devrait sans doute être une fille. Pareil pour une femme enceinte (bien que ça n’arrête pas Arnold Schwarzenegger).

Ou tout simplement si vous voulez jouer une scène banale, sans décalage, pour exprimer un point de vue sur le sujet. Ca peut tout à fait être un choix artistique.

Mais dans ce cas, pourquoi ne pas faire jouer les rôles « féminins » par des femmes et les rôles « masculins » par des hommes ? Et si la réponse à cette question est « parce qu’on n’a pas assez de femmes sur scènes » (le contraire étant plutôt rare), et que vous n’êtes pas seul en scène, eh bien… Voilà.

PS : pour cet article j’ai hésité entre les termes « sexe » et « genre ». Voilà la différence d’après l’OMS : http://www.who.int/gender/whatisgender/fr/ . Mais du coup j’ai choisi « sexe » parce que je me suis dit que ce serait plus vendeur.

Une réflexion sur “3 raisons de jouer son propre genre

  1. Pingback: Impro et genre – Spontanement

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